C’est un petit cagnard entre deux pans de roches
Bien abrité du vent au soleil du midi
Même pendant l’hiver le printemps semble proche
Décembre y passe tiède et janvier y fleurit.
J’aime aller y rêver. La nature est secrète
Elle s’entrouvre à moi. Quelques genêts parés
Font de ce petit nid une alcôve discrète
Encadrant la vallée étendue à mes pieds.
Le gel n’y survient pas, sous le mimosa tendre
Eclot tôt en saison de flocons parfumés
Un vieux mur éboulé sait se faire comprendre
En tendant son aplomb à mon dos fatigué.
Pourquoi, vus de si haut, les creux qu’habitent l’homme
Paraissent si tranquilles et si hospitaliers
Les sons sont clairsemés dans l’air azuré comme
Les agneaux et brebis éparpillés aux prés.
Sinuant en douceur son ruban gris, la route
Estompe par moment la soie de ses lacets
Dans l’ombre d’un vieux pont qui le soir se veloute
D’un peu de bleu nacré, couvert d’un voile frais.
A l’abri dans le chaud ramassé de la pierre
Je tarde encore un peu, le spectacle est si doux
De ce tableau vieilli que dore la lumière
Rasante du soleil sur le brillant du houx.
Un frisson me saisit, est-ce encore la vie
Ce paisible pays où le temps suspendu
A l’écart du fracas offre à ma vue ravie
Le goût d’un paradis au plaisir défendu.
Dans ce temps ralenti, suis-je encore dans le monde
Sur l’extrême limite à ce qui est permis
Figé loin de ce bruit de l’infernale ronde
Je crois que rêvais ! Me serais-je endormi ?